L'autre jour, je discutais avec une maman perdue face à l'attitude de son jeune ado qui se plaignait qu'il ne l'écoute pas, n'en fasse qu'à sa tête, ne range pas ses affaires, etc… bref une cohabitation difficile et deux personnes en souffrance.
Que dois-je faire? me demande-t-elle.
Et bien, je n'ai pas de recette toute faite à appliquer, ce serait facile et j'aurais évidemment beaucoup de succès. Dans la plupart des cas similaires qu'on me présente, je constate ceci: l'enfant, jeune adolescent voire plus jeune, se rebelle contre l'attitude autoritaire de son entourage, que ce soit ses parents ou le corps enseignant.
On pense que la crise d'adolescence est normale et fait partie du processus d'évolution de l'enfant et moi je crois que c'est habituel mais que ce n'est pas normal. Ce n'est pas censé se passer comme cela. Cependant, la manière dont la plupart des parents éduquent leurs enfants et la manière dont la société les considère ne peuvent mener qu'à une rébellion des jeunes.
On leur manque tout simplement de respect et ça commence dès tout petit: on leur impose nos critères, ils doivent rester sages, ne pas déranger, étudier ce qu'on décide qui est intéressant pour eux, ne pas bouger, on les oblige à finir leur assiette quand ils n'ont plus faim ou qu'ils n'aiment pas, les obliger à dire merci avant même qu'ils aient envie de le dire spontanément et avec sincérité, on les punit s'ils ne répondent pas à nos attentes, on les récompense pour qu'ils comprennent qui ils doivent devenir et comment "bien" se comporter, etc… La liste est longue malheureusement des comportements dystropiques à l'égard des enfants, c'est-à-dire des attitudes qui bloquent la manifestation du potentiel chez les enfants et les empêchent de satisfaire leurs Besoins Fondamentaux (sécurité, repères, liberté, amour, cohérence, sens et réalisation).
Vous croyez que j'exagère? J'aimerais… Mais chaque jour m'apporte son lot d'exemples tristes de parents perdus, désespérés. Comment voulez-vous qu'une relation de confiance puisse s'établir, le dialogue s'installer sincèrement, si l'enfant se sent obligé en permanence de s'adapter aux attentes des adultes. Comment voulez-vous qu'il participe à l'harmonie du système familial spontanément si on lui dit qu'il n'est pas chez lui, que c'est nous qui payons le chauffage, les courses, etc…? Alors qu'on sait très bien qu'il ne peut pas y participer puisqu'il ne peut pas travailler (et qu'il doit même plutôt faire des études et universitaires de préférence). Parfois même, quand l'enfant plus jeune veut aider à mettre la table, on lui dit non parce qu'on a peur qu'il casse la vaisselle par exemple et après on s'étonne qu'il rechigne à donner un coup de main: son élan naturel a été cassé. Point.
Comment attendre des enfants qu'ils nous respectent, si nous ne les respectons pas nous-mêmes? Quelle liberté d'action et d'expérimentation de la vie leur laissons-nous lorsque nous avons sans cesse peur qu'il leur arrive quelque chose.
C'est quand même bien nous les parents qui avons fait venir notre enfant, non? Quel autre choix a l'enfant que de nous faire confiance, de se fier à notre expérience, de nous prendre pour guide et pour modèle? Notre responsabilité est grande. Lorsqu'adultes, nous confions nos difficultés à quelqu'un, lorsque nous demandons de l'aide ou un service, n'attendons-nous pas aussi d'être respectés?
J'exagère, vous m'en voulez? Vous vous sentez coupable peut-être? Coupable de ne pas avoir fait ce qu'il fallait, de constater la rupture avec votre enfant à qui vous avez tout donné avec tant de bonnes intentions?.
Oui, le mot est lâché, coupable… Je crois hélas que c'est probablement le plus grand obstacle à la conscience de sa responsabilité: rester dans la culpabilité. En effet, je pense que par un mécanisme de défense, notre peur de nous sentir coupable, d'avoir mal fait nous pousse à rejeter la responsabilité sur l'enfant lui-même, ou bien sur la société, les profs, ses propres parents, etc… Mais surtout pas soi! Ça ferait trop mal… et ça fait mal d'ailleurs…
Or, voyez-vous, il ne s'agit pas de trouver qui a commis une faute. Car nous agissons toujours en fonction de ce que nous croyons, en fonction de notre vision de l'enfant, notre vision de l'éducation, notre système de croyances. Nous ne pouvons donc pas agir différemment et il n'y a pas de faute car ces croyances, nous les avons intégrées dans notre propre enfance au travers de l'éducation reçue de nos parents. Ce sont eux alors les coupables? Non, ils n'ont pas non plus commis de faute, ils ont aussi agi en fonction de leur système de croyances… Leurs parents, alors? Non plus. Nous pourrions remonter à Adam et Eve peut-être… Ce qu'il faut comprendre, c'est que tant que nous ne changeons pas notre système de croyances, nous ne pouvons changer notre manière d'agir ou alors c'est du comportementalisme. Mais chassez le naturel, il revient au galop…
Je vous invite à sortir de la culpabilité et à entrer dans la responsabilité: assumer sa responsabilité d'avoir fait venir un enfant sur Terre, prendre conscience de ses propres croyances négatives afin surtout de les changer. Afin de rétablir peu à peu un lien de confiance avec son adolescent ou pour éviter de le perdre. On peut tout "guérir", il n'est jamais trop tard, mais rien ne vaut mieux que la prévention. N'attendez pas que ça se passe mal pour apprendre à respecter les besoins de votre enfant. Informez-vous et formez-vous pour devenir des parents épanouis et surtout des adultes heureux! C'est le plus beau cadeau que l'on puisse faire à un enfant.
Laurence Legrand
Aligneuse et Animatrice de stages "Éducation Syntropique"
www.blanchecolombe.be